Je jetai un bref coup d’œil pour très vite réaliser que mon premier cours de l’après midi débuterait dans moins d’une demie heure. Ensevelie sous des centaines de parchemins abordant tous avec précision l’art subtil des potions, je soupirai d’un air las avant de remettre un peu d’autre sur mon bureau encombré. J’appréhendai légèrement le cours qui allait avoir lieu l’après midi même, car il se trouvait qu’il allait être particulier et mené différemment de tous les autres. En effet, ce jour là, et c’était prévu de longue date, je devais recevoir dans ma classe un intervenant de la Recherche en Potions Magiques du Ministère de la Magie, afin d’approfondir mon cours, et donner une idée aux élèves de ce que pouvaient être l’art obscure de la potion, s’il était parfaitement maîtrisé. Malheureusement, le dit intervenant, un vieillard à la santé fragile, se faisait porter absent depuis un mois déjà, et je n’avais pas eu de nouvelles de lui depuis autant de temps. C’était ainsi que je m’étais retrouvée avec le célèbre Empoisonneur, Mr. Lust Whitaker, lui aussi chercheur au ministre de la magie, mais aussi mon ancien étudiant, lorsque lui-même se trouvait à Poudlard, il y avait encore cinq ans de cela. Pour un orgueil tel que le mien, il n’était pas évident d’admettre que l’élève avait dépassé le maître, et que le jeune homme en savait plus sur les potions que moi, mais après tout, il passait tout son temps à rechercher, quand moi-même n’avais le temps que pour enseigner les rudiments à mes élèves. Ainsi, j’appréhendai cette rencontre professionnelle, quand jusque là, je n’avais connu Lust que dans sa sphère privée, et me demandai si nous étions compatibles pour donner à deux un cours de potions. J’avais la désagréable sensation que ce ne serait pas aussi facile que je ne voulais bien le prétendre. Me levant de mon fauteuil confortable, je rajustai mon pull, par-dessus le quel je j’enfilai ma robe de sorcière sombre, aux bordures dorées. Empoignant ma baguette et un sac où maintes fioles se trouvaient, je me dirigeai d’un pas lent vers le plus grand cachot du château où aurait lieux de cours. Quand j’arrivai, la pièce était vide, baignant dans une atmosphère humide et un silence de mort. Détestant plus que tout le froid glacial qui stagnait dans la pièce, j’allumai d’un coup de baguette un feu ronronnant dans l’âtre habituellement vide de la cheminée. Des bougies s’éclairèrent un peu partout dans la salle, dont une au dessus de chaque chaudron. Enfin, d’un ultime coup de baguette, je positionnai les chaudrons, d’habitude placés en rangées, dans un demi cercle avec pour centre mon chaudron et le guéridon sur le quel reposaient tous les ingrédients possibles et inimaginables comme du napel, de la pierre de Lune ou encore des plumes de Jorbabille.

Derrière moi se trouvait le tableau noir vieillit par le temps, un peu poussiéreux. D’un geste rapide de ma baguette, j’inscrivis en lettres d’or l’intitulé du cours « Reconnaître, faire et contrer un poison ». C’était un cours pour les élèves les plus âgés de Poudlard, et Lust étant un véritable spécialiste dans ce domaine, plutôt que dans les filtres d’amour, nous avions jugé bon d’en aborder le sujet. Regardant ma montre d’un énième coup d’œil distrait, j’entendis très vite des bruits de pas derrière moi : il s’agissait de Lust. Je lui adressai un sourire plein de charme et de fossettes, et m’avançai vers lui d’un pas assuré et fier. « Tu n’étais pas aussi ponctuel lorsque tu étais encore étudiant. » Lust avait été de ces élèves au don pour la magie inné mais qui ne mettaient pas du leur pour s’améliorer ou ne serait-ce que participer au cours. Je posai un regard nostalgique sur Lust avant d’étouffer un sourire plus taquin. La première fois que nous nous étions réellement rencontrés, c’était dans un cachot désaffecté, humide et sordide où nous avions échangé des mots bien au-delà de tout ce que l’éthique nous permettait. Ce temps là était loin à présent. Le cours allait enfin commencer, et je n’eu pas le temps d’en dire plus à Lust, car déjà, des élèves entraient en classe dans un brouhaha incessant plus que significatifs : je les avais prévenus que ce cours serait particulier et qu’ils bénéficieraient de l’intervention d’un chercheur en potions. Lorsqu’ils eurent tous retrouvé leur place habituelle derrière leur chaudron, je tapai dans mes mains pour attirer leur attention et déclarer d’une voix douce et à peine plus élevée que mon timbre habituel.

« Un peu de calme, les jeunes. Bien, est-ce que tout le monde voit bien, et surtout, est-ce que tout le monde à bien tous ses ingrédients ? »

Des hochements de tête se firent de part et d’autre de la classe, j’adressai un sourire à mes élèves qui regardaient tous Lust avec intérêt, tel un gladiateur entrant vaillamment dans la fausse aux lions. Je ne regrettais finalement pas que Lust fasse cette intervention plutôt que le vieux sorcier malade, car ce dernier se serait fait littéralement dévorer par mes élèves, tandis que j’étais assurée que Lust saurait les maintenir dans une poigne de fer. Quant à moi, j’étais ce jour là à la fois élève et enseignante, et j’attendais de voir Lust se comporter face à une classe emplie d’élèves assoiffés, et pas seulement de connaissance et de savoir…